román -- i, myself, am made entirely of flaws

Román, il a toujours été un peu irresponsable. La dérision pour protection, une armure d'insouciance déguisant les conflits intérieurs, les blessures dont il s'acharne à prétendre ne pas conserver de séquelles. Il y a d'abord le besoin de paraître fort et, ça, il ne sait pas le faire autrement qu'en tournant tout en ridicule, l'humour en guise de mécanisme de défense. Ensuite, le sentiment d'illégitimité, la conscience que d'autres traversent bien pire, l'impression de se plaindre pour rien, de se victimiser, de ne pas se montrer suffisamment reconnaissant de ce qu'il a, de ce que ses parents ont pu sacrifier pour lui. Alors il vanne, il réprime, il sourit, et puis parfois il implose, Rom, parfois il explose. -- Il aurait voulu qu'on lui dise, qu'il était différent, plutôt que de le découvrir à force de quolibets. Ca n'a pas été courant, pas quotidien, pas même mensuel, il est arrivé qu'il passe une année scolaire entière sans que l'on n'ose lui dire quoi que ce soit (il ne doute pas que cela ait été pensé, cela dit) et s'est même pris à croire, vers l'âge de quatorze ans, que c'était terminé, que tout le monde était désormais suffisamment mature que pour ne plus trouver les blagues sur les étrangers amusantes. Si cela a été le cas de ses camarades, le reste de la ville n'a apparemment pas reçu le mémo. Au boulot, il a été le "bon mexicain", celui qu'on ne considérait pas vraiment comme un étranger, en plus sa mère est américaine, on oubliait presque la couleur de sa peau, on pardonnait ses interjections en espagnol, avec des phrases comme "oui mais toi, c'est pas pareil". Dans la rue, on le regarde de travers, encore aujourd'hui, il ne se fatigue même plus à tenter de paraître inoffensif et souriant et doux et moins étranger. Il s'en fout, il est fier, il sera toujours fier de sa peau, de sa langue, de son héritage. -- Anger issues, la possibilité a été évoquée maintes et maintes fois, lorsqu'il s'emportait pour un rien, perdait patience, se montrait mordant sans raison apparente, irritable et toujours si critique. Román, il a toujours mis cela sur le compte des mauvaises expériences répétées, la colère légitime de celui qui doit se battre plus que les autres, faire ses preuves plus que les autres, et tout cela pour ne jamais être tout à fait accepté. Même lorsque son poing s'écrasait un peu trop promptement contre le nez du premier disposé à le contredire, même lorsqu'il créait tout seul des situations dans lesquelles la violence serait de mise, même lorsque, peu importe le nombre de coups portés, le nombre d'insultes balancées, sa rage ne s'éteignait pas, la flamme ne mourait pas. Aujourd'hui, il gère mieux, tout cela, il s'éloigne, s'isole le temps que la tempête se couche, mais les émotions sont toujours là, se bousculent sans prévenir dans ses veines pour le mettre dans tous ses états. -- Il ne sait pas combiner indépendance farouche et sentiment d'appartenance, et s'est donc trop souvent détaché de son clan, de ses amis, de ses relations en général. Cela s'est souvent marqué auprès de sa famille, à laquelle il s'est toujours identifié selon ses propres termes, selon l'envie, et le besoin. S'il les aime plus que tout, le montrer est une autre question, une équation pas tout à fait résolue. Auto-exclu des mois durant, revenu pour travailler, reparti aussi vite, il a la bougeotte, tout le monde le sait, il croit bien que ses frères et sœurs ne lui en veulent pas vraiment, l'une de ses cadettes a repris le flambeau aussi sec, comblant son incapacité à être un modèle, un grand frère digne de ce nom. Lui ne se le pardonne pas, lui se sait décevant et indigne, lui ne fait qu'intervenir sporadiquement avec son côté protecteur mal placé et effrayer les prétendants de ses sœurs, ou balancer des conseils non-sollicités sur des sujets qu'il ne maîtrise même pas. Mais il essaie, Rom, d'autant plus lorsque leurs parents sont dans les parages, même s'il restera à jamais le grand frère fun et un peu rebelle, injustement préféré à la soeur responsable et réfléchie. -- 2017. Il a monté son affaire, la réalisation que tout ce qui méritait d'être investigué ne l'était pas forcément, la compréhension définitive que la police a ses propres règles, ses limites, sa propre version de l'omertà. Il a rapidement déchanté quant à l'impact qu'il pouvait avoir sur la communauté, mais il fait sa part, Rom, il aide ceux qu'il peut et c'est déjà particulièrement gratifiant.

vrac : il lui arrive fréquemment de passer la nuit dans son bureau, endormi sur le canapé au beau milieu de ses recherches. il peut dormir n'importe où, Román, mais il a le sommeil léger. -- il dessine, ce n'est pas de notoriété publique mais il aime ça depuis son plus jeune âge. ç'a commencé dans les marges de ses cahiers d'école, pour s'occuper, avant de tourner à une passion plus assidue. cela l'aide de temps à autre pour ses enquêtes. -- il se déplace exclusivement sur le dos de sa triumph thunderbird 1700. -- ses téléphones finissent, plus tôt que tard, par s'écraser au sol, d'une manière ou d'une autre. il a cessé de vouloir à tout prix du neuf, du non-fissuré, et s'accommode des lézardes. -- il a la mauvaise habitude de fumer, attrapée à l'adolescence et entretenue au fil des années, plus encore depuis qu'il passe des heures en planque, ça l'occupe. -- son tout premier salaire a été investi dans un tatouage, et les dessins se sont depuis multipliés sur sa peau. -- ses parents lui ont inculqué de solides bases en cuisine, qu'il ne manque pas de mettre à profit. il vit plus sainement qu'il n'y parait. -- il ne pratique aucun sport, n'a jamais tenu plus d'une saison dans le moindre club (et il en a tenté pas mal). basket, judo, foot, natation, boxe, athlétisme, il s'est systématiquement lassé. ce qui ne l'empêche pas de se caler devant la télévision pour supporter les équipes vedettes de la ville (et le Mexique aux championnats mondiaux). -- il aime les animaux, n'a simplement pas suffisamment de temps à leur consacrer que pour en adopter. il n'exclut cependant pas totalement l'éventualité, si l'occasion se présente.