SPECIAL EDITION ›› when Mémé meets Román

Après de longues semaines au Bhoutan, Mémé se réjouit d’avoir retrouvé sa ville natale. Plus important encore : elle se réjouit de retrouver ses habitants - certains plus que d’autres. Elle a d’ailleurs convié Román à un petit rendez-vous en tête-à-tête, dans un café en plein centre de Chicago. L’invitation lui a été envoyée directement par la poste, et il faut dire que Mémé a usé de sa plus belle écriture. N’ayant reçu aucune réponse de la part du détective, elle ignore à l’heure actuelle si le beau détective lui fera honneur de sa présence. Cela n’empêche pas Mémé de se faire belle. Oh, elle n’est pas idiote Mémé. Elle a conscience d’avoir assez peu de chance de vivre une belle histoire d’amour avec le mexicain. Mémé reste néanmoins une femme très coquette qui aime soigner son apparence en compagnie des hommes. Là voilà donc joliment apprêtée, installée à une table en attendant que Román ne se montre. Au moment où elle l’aperçoit, la vieille dame se lève et lui adresse d’emblée son plus beau sourire.

« Román, je suis ici ! »

Au cas où elle ne l’aurait pas remarqué, elle accompagne son exclamation de grands gestes. Elle aperçoit un sourire sur le visage de Román, lui réchauffant le coeur.

« Ma chère Mémé, ravi de vous revoir à Chicago. On a eu peur que vous ne restiez en vacances, vous aviez l’air de vous y plaire. »

Mémé ne peut pas s’empêcher de glousser face à la remarque du détective.

« Il est vrai que le Bhoutan m’a beaucoup plu, mais tu sais bien que Chicago reste ma ville favorite.
- Je suis content que vos vacances se soient bien passées. »

Un sourire tendre illumine le visage de la vieille dame. Oh, elle est charmée par les mots de Román. Savoir qu’il se réjouit pour elle lui fait plaisir.

« En ce qui me concerne, je suis contente de voir qu’Avalon ne m’a pas encore remplacée, dit-elle d’un air innocent. »

Elle voit bien que sa remarque le trouble. Pourtant, il sourit et de nouveau, Mémé se laisse envoûter.

« Je ne pense pas que vous remplacer soit possible.
« Oh, Román…, dit Mémé en essayant de cacher ses joues rougies à l’aide de ses mains. Je t’en prie, installe-toi, dit-elle en désignant la chaise en face d’elle. Comment vas-tu, je ne t’ai pas trop manqué ?
- Merci,  dit-il en s’asseyant face à Mémé. Je vais très bien, encore mieux maintenant que vous êtes rentrée, le temps se faisait long sans vous bien sûr. Peut-on espérer lire un jour un récit détaillé de vos aventures ?
- Je ne sais pas Román, peut-être. J’aime avoir mon petit jardin secret et le protéger. »

En revanche, ça ne la dérange pas d’exposer les secrets des autres. Pas top, Mémé. Román hoche simplement la tête à sa réponse, un air déçu inscrit sur le visage. Mémé en fait abstraction.

« Qu’est-ce que je t’offre ? Un café, ou autre chose ?
- Un café serait parfait, merci beaucoup. »

Elle prend note de la commande de Román puis intercepte une serveuse pour lui en faire part. En ce qui la concerne, un thé sera amplement suffisant. Aussitôt la serveuse repartie, Mémé reporte toute son attention sur le mexicain.

« Tu sais, je n’avais pas voyagé depuis des années. C’était même ma première fois en avion, je dois dire que je ne faisais pas la maligne, avoue-t-elle en riant. Mais je suis fière et heureuse de mon voyage. »

Elle sourit en repensant à ces belles semaines passées sur un autre continent. Elle a eu l'occasion de découvrir des paysages magnifiques en plus d'une culture qu'elle ne connaissait absolument pas. Habituée à Chicago depuis des années, ce voyage était un changement d'air nécessaire. Román l’écoute activement, hoche la tête de temps à autre.

« Vous avez de quoi être fière, c’est courageux de sortir de sa zone de confort. »

Mémé le remercie d'un sourire. Il est vrai que partir aussi loin lui a demandé beaucoup de courage.

« As-tu voyagé dernièrement ? Au Mexique peut-être ? »

À sa question, Román lui sourit et secoue la tête.

« Non, ma sœur a menacé de m’enlever pour m’y forcer, dit-il en riant brièvement. J’ai eu trop de travail ces dernières années, c’était plus facile de rester à Chicago. Le Mexique me manque, mais je ne suis pas très branché préparatifs, je préfère quand quelqu’un d’autre organise. Pas par paresse, enfin, peut-être un peu, mais c’est surtout plus facile de se décider quand on a pas trop le choix. »

Il hausse une épaule, l’aveu un peu honteux.

« Tu sais, c’est important de prendre du temps pour soi. Ta soeur aurait eu raison de t’enlever. dit-elle avec sérieux. »

Entre temps, la serveuse apporte leurs boissons. Mémé remercie la jeune femme, puis trempe ses lèvres dans son thé brulant. Román l'imite.

« Oh je ne doute pas qu’elle le fasse une prochaine fois. »

Le sourire aux lèvres, Mémé en profite pour jouer de ses charmes.

« Je serais plus que ravie d’organiser quelque chose pour toi. Bien entendu, nous partirions ensemble. »

Un sourire amusé naît sur la visage de Román à la proposition de Mémé.

« Ce serait adorable. Vous avez une idée de destination ? »

Elle réfléchit un instant, passe en revue les destinations qui la font rêver depuis des années.

« Je suis jamais allée en Europe et je crois que ça me plairait beaucoup. On pourrait faire une sorte de Road Trip, visiter les grandes capitales… Rome, Paris, Londres, Amsterdam…, énumère-t-elle, rêveuse. Mais je dois déjà me remettre du Bhoutan. Je ne suis plus toute jeune !
- Je n’y suis jamais allé non plus, ce serait idéal. Quand vous serez remise, bien sûr, rien ne presse. »

Elle boit une gorgée de thé, le sourire aux lèvres.

« Je suis curieuse, Román. Quels sont pour toi les incontournables à mettre dans ta valise lorsque tu pars en voyage ?
- Eh bien, je ne suis pas un grand fan des grosses valises et je voyage léger. Je préfère que tout tienne dans un sac à dos, dans la mesure du possible, alors c’est vraiment les essentiels. Et puis je n’oublie jamais mes lunettes de soleil et une casquette. Et vous ?
- Au contraire de toi j’ai toujours peur de manquer de quelque chose, explique-t-elle avec le sourire. Ma trousse de toilette doit être complète et je ne pars jamais sans une bonne crème solaire ! C’est important de prendre soin de sa peau. J’emporte également toujours ma tablette, pour les jeux mais aussi pour toujours être connectée. Et puis une boîte de thé, au cas où.
- Vous ne faites pas confiance aux thés locaux ? interroge-t-il avec amusement.
- Oh non ce n’est pas une question de faire confiance aux thés locaux. Certaines personnes ne peuvent démarrer leur journée sans une bonne tasse de café. Pour moi c’est le thé. Je serais horrifiée de devoir démarrer une journée sans mon thé, qu’elle explique avec sérieux.
- Alors quel thé en particulier emmenez-vous partout ? 
- Le thé Earl Grey Russian à la bergamote et au citron. Un vrai délice. »

D'ailleurs, le thé qu'elle tient entre les mains lui paraît bien fade comparé à celui qu'elle boit depuis des années.

« En dehors de ma propre personne, avec qui aimerais-tu partir pour tes prochaines vacances ? Avalon, peut-être ? »

La vieille dame soulève sa tasse de thé, observe Román par dessus celle-ci. Le mexicain secoue alors la tête.

« Faites attention, on pourrait croire que vous êtes jalouse. Avalon et moi, on travaille ensemble, je pense que les vacances sont plutôt faites pour s’éloigner du boulot, non ? Et puis, c’est ma sœur qui serait jalouse si je passais mes prochaines vacances avec quelqu’un d’autre.
- Évidemment que je suis jalouse, admet-elle sans gêne.
- Vous n’avez pas de raison de l’être, Avalon est très professionnelle. Et je pense qu’elle vous admire trop pour vous faire un coup bas.
- J’admire également beaucoup Avalon, répond aussitôt Mémé. Elle est très charmante et je pense que vous formerez un joli couple. Mais ce n’est que mon avis, bien entendu. »

Mémé aime un peu trop partager son avis, c’est bien connu.

« Soyons honnêtes, je formerais un joli couple avec n’importe qui, plaisante-t-il. Mais non, non, Avalon et moi ce n’est certainement pas à prévoir. Et puis je vous croyais jalouse ? »

Elle se contente de sourire à la remarque de Román et hoche la tête.

« Ne jamais dire jamais…, souffle-t-elle sur le ton de la confidence. Et oui, je suis jalouse, mais pas possessive. » Sharing is caring, comme on dit.

« Si vous le dites, sourit-il. C'est très noble de votre part. »

La vieille dame change rapidement de sujet en repensant à Elena, la soeur du détective.

« Si tu veux mon avis, ta sœur n’hésiterait pas à partir sans toi. Au Maroc, par exemple. Avec… comment s'appelle-t-il déjà ? Ahmed ? »

Elle souffle ça avec un sourire en coin avant de boire un peu de thé tout en délicatesse. Román en fait autant, cachant le sourire qui menace d’apparaître. Il finit par poser sa tasse.

« Je vois que l’on aborde tous les sujets qui fâchent. Je ne sais pas exactement ce qu’il se passe entre eux, j’imagine que vous êtes plus informée que moi. Mais oui, je suppose qu’elle n’hésiterait pas.
- Oh, loin de moins l’envie de te contrarier Román. N’oublie pas que dans tous les cas, tu ne seras jamais seul pour partir en vacances. As-tu déjà oublié notre tour d’Europe ? » 

Il lui sourit et termine son café.

« Oh non, je n’attends que ça, comment l’oublier ?
- Me voilà rassurée ! J’ai presque eu peur. »

Mémé termine sa tasse de thé à son tour puis jette un œil à sa montre.

« Sache mon petit Román que j’ai été plus que ravie de passer du temps avec toi. Je vais bientôt devoir partir, mais j’espère de tout cœur que nous pourrons nous revoir.
- Moi de même, merci de m'avoir invité. Je reste à votre disposition, bien sûr.
- Puisque tu proposes… Ai-je le droit de demander une photo ? Un… selfie ? dit-elle en fronçant les sourcils, incertaine quant au terme à utiliser.
- Je n'osais pas le suggérer, fait-il en se levant pour rejoindre le côté de Mémé. »

Mémé ne peut s’empêcher de lâcher une petite exclamation de joie. Elle fait une petite place à Román puis sort son appareil photo numérique de son sac à main. Lui, de son côté, est flatté et attendri par la réaction de Mémé. Il sourit largement pour la photo, un bras autour des épaules de Mémé.

« Un, deux, trois… Oustitiiii ! »

Elle affiche son plus beau sourire le temps de la photo - ce qui ne lui demande pas trop d’effort tant elle est heureuse et fière de cette photo.

« Merci, Román, dit-elle, la main sur le cœur.
- Le plaisir est pour moi. »

Il lui prend la main et y dépose un baiser. Pour la énième fois depuis le début de ce rendez-vous, Mémé glousse. Charmée par le mexicain, elle le remercie à nouveau avant de finalement se lever.

« A bientôt alors, dit-elle, le sourire jusqu’aux oreilles et les yeux remplis d’étoiles. »