(juliet), magnet for happiness

I'm coming home, Rico's for takeout, oh. I'm all alone and I just need some fuckin' friends. Greek Theatre's closed, ain't got a thing to do, I'm all alone and I just hit up all my friends › @juliet hamilton

I wanna dance with somebody à fond dans ses écouteurs, il marche et sautille à moitié en direction du restaurant, mains dans les poches et zigzaguant entre les passants qui, à cette heure, rentrent du travail. Il devrait être avec eux, silhouette supplémentaire sur le quai du métro après une longue journée au bureau, la bandoulière de son sac à une épaule et son téléphone coincé entre l'autre et son oreille pour prendre un énième appel important. Son tableau est vaguement (très) différent, mais c'était lui, il y a quelques semaines, quelques mois. Bureau, maison, bureau. Pourquoi ne peut-il s'empêcher de regarder en arrière ? Ce n'était pas lui, pas pour lui, pas bien longtemps, pas plus longtemps que les années qu'il a données à ce mode de vie, tentative de faire les choses bien, normalement. Artiste ne paie pas, il peut en témoigner. Et pourtant, pourtant, il s'en sort. Pas comme un vrai adulte, ne cesse-t-on de lui rappeler, non pas directement mais à travers toute une imagerie, quotidiennement, de choses qui ne voudraient rien dire s'il n'était pas là où il est, aujourd'hui.
Il passe déjà à autre chose, la foule de l'heure de pointe dépassée, et sa playlist passant à une chanson en espagnol qui demande toute sa concentration pour vérifier qu'il en comprend encore les paroles. Devant lui, le restaurant nigérian offrant ce soir un cours de cuisine. Il a de l'avance, s'assied sur le rebord de l'une des fenêtres et ne tarde pas à voir arriver une silhouette connue. Il se redresse, fait quelques pas pour aller à sa rencontre. « Fancy meeting you here », déclare-t-il avec une légère courbette de salut, alors même que c'est elle qui lui a transmis l'info, et qu'ils se sont inscrits en binôme. Juliet, son binôme pour toutes les idées qui ne semblent d'ordinaire enchanter que lui. Il la connaît à peine, pourtant, quoi qu'ils partagent une certaine tendance à ne pas garder grand chose pour eux-mêmes, oversharing comme une façon (visiblement efficace) de tisser des liens. « Tu vas bien ? »

• @esras whelan
Petit pas chassé enchaîné d’un mouvement de chasse neige et hop, saut, demi-tour en l’air et elle atterrit au sol souplement, les épaules déjà lancées dans une nouvelle chorégraphie pour suivre le nouveau rythme qui bat entre ses tympans, musique audible pour elle seulement et elle passe outre les regards qui lui sont lancés en coin, trop habituée à être perçue comme folle ou extravagante — quand ce n’est pas les deux. Les Chicagoans sont plus sensibles à l’excentricité mais s’y font néanmoins et elle a appris, Juliet, à ne plus se préoccuper de ces paires d’yeux surpris qui s’attardent sur elle. Elle continue donc sa petite danse improvisée, revenant parfois en arrière pour mieux avancer, petit pas, petit pas, petit pas et elle virevolte, tourne à l’angle de la rue et ses écouteurs s’arrachent de son téléphone, la voilà stoppée net. Elan rompu, les épaules se relâchent tandis que ses mains tentent d’attraper le fil de ses écouteurs qui s’envole d’ores et déjà. Après une courte bataille elle parvient à les rebrancher, relance une musique mais l’envie de danser n’est plus là — et puis, de toute façon, elle arrive bientôt, la devanture du restaurant déjà dans son champ de vision et la silhouette qui se découpe devant celle-ci. Elle esquisse un sourire, accélère le pas, s’arrête à sa hauteur pour lui rendre son salut élégant. « Yeah, I know, who would have guessed we’d meet around here? » Eux, sans doute, puisqu’ils se sont donné rendez-vous. Elle saute déjà sur le côté, Juliet, pour se pencher par-dessus l’épaule d’Esras et loucher sur le programme affiché dans la vitrine. « Hm, at least they’ve chosen what we’re supposed to cook. » Ce qui leur évitera au moins un désastre — celui d’inventer leur propre plat et sans aucun doute provoquer quelques intoxications au passage. Elle tourne la tête, hoche la tête. « Fine, and you? Are you ready to be the next Capital’s head chef? » Elle prend une pose de leader, power pose comme l’appellerait Amy Santiago avant de lever le pouce, attraper l’avant-bras d’Esras et de le traîner à l’intérieur du restaurant. La lumière y est plus tamisée et elle s’arrête quelques secondes pour papillonner des yeux le temps de s’acclimater — le temps, aussi, pour un serveur de venir les rejoindre et prendre leur nom avant de les placer devant un plan de travail. « We’re quite a few, I don’t like it. » Ca veut dire que le chef aura plus de temps à accorder à leur plat — et donc à les juger.

- @juliet hamilton

Il a découvert l'annonce et son regard s'est illuminé comme à la vue d'une carte au trésor (quoi qu'il n'ait jamais eu de carte au trésor sous les yeux). Un cours de cuisine, ouest africaine qui plus est ? Don't mind if I do, fut sa première pensée, et il a cliqué frénétiquement sur "inscription" avant même d'en parler à celle qui, ce soir, le rejoint tout de même pour l'aventure. Il aurait très bien pu venir tout seul, l'aurait d'ailleurs fait si Juliet n'avait pas été disponible et que ses amis l'avaient lâchement abandonné, mais il aime partager, Esras, et mieux vaut sans doute avec des gens qui le connaissent qu'avec tous les autres participants à la soirée. Quoi qu'il mettrait de l'animation. Au final, ce soir, ils sont deux pour remplir ce rôle, Juliet ne tardant pas à apparaître et lui rendant sa courbette. « Truly a wonder », il continue dans le jeu de fausse surprise, avant de suivre le regard de la jeune femme pour consulter lui aussi le programme. Tout ne lui est pas familier et il s'en réjouit, bien que, comme il semble le détecter chez elle également, ce soit un stress supplémentaire pour lui (eux) qui n'y connait déjà pas grand chose. Mais il apprend, Esras, et relativement vite. Il connaît les différents ustensiles, et les différents légumes, et c'est déjà une bonne partie du boulot, right. « Yeah. I don't know what most of it is but it sounds delicious. » Ce qui ne signifie pas qu'ils parviendront à le rendre délicieux dans leur version, mais c'est déjà mieux que rien. « Oh I'm good, and more than ready. You'll be what, co-head chef ? You're not gonna be sous. » Il a regardé des émissions culinaires, Es, ou surtout des séries, et il se voit très mal supporter la vie de cuisinier, mais a très certainement gagné une grande admiration pour les acteurs de ce milieu (ceux qui ne passent pas leur temps à crier sur leurs subordonnés, du moins). Sur ce, il se laisse guider vers l'intérieur, où ils sont promptement repérés et dirigés vers leur plan de travail pour la soirée. « Why not ? It's nice, intimate. » Ils ne sont effectivement pas plus d'une dizaine, arrangés par deux, il faut dire que les places étaient limités, raison de plus qui lui a donné envie de participer. La cheffe ne tarde pas à apparaître et il suffit de cela pour repérer les vrais fanas de cuisine, à leurs murmures excités. Il est vrai qu'il s'est un peu renseigné et n'a lu que des merveilles, ce qu'il s'empresse de partager avec son acolyte: « Oh yeah, okay, get this, I read she's the nicest and soo talented, we're lucky. I'm actually a little ashamed 'cause I really didn't know her before this morning and people seem starstuck. »

• @esras whelan
Le rire éclate au grand air et elle est emportée par sa joie de retrouver Es, Juliet. Parfois, il lui rappelle Neelam, comme en cet instant, alors qu'ils jouent le même jeu un peu ridicule de la fausse surprise et qu'ils sont sur le point d'embarquer dans une aventure sans nul doute rocambolesque. Elle a un pincement au coeur à la pensée de son meilleur ami, se promet silencieusement de lui envoyer un message tout bientôt (elle ne tiendra pas parole, elle en a vaguement conscience mais elle aime penser le contraire, Ju) qu'elle chasse prestement d'un geste bien réel du poignet tandis qu'elle louche sur le programme. La tête se hoche vigoureusement aux propos d'Es qu'elle pointe d'ailleurs du doigt. « Amen brother. Plus, there is nothing like new things to give life more excitements. » Une règle d'or qu'elle vient d'inventer de toute pièce mais il n'a pas besoin de le savoir (ni même de s'en douter). « And we can't die not knowing how to cook a meal properly. That would be an insult to... Life itself. And Mother Nature, of course. » Parce que la reine mère ne s'amuse pas à faire pousser des ingrédients pour que des humains les massacrent. Pas de son point de vue à elle, en tout cas (et puis, elle avait juste envie de rappeler que c'est une entité féminine qui est à l'origine de tout et surtout de plus essentiel : la vie). « Co-head seems like a job for me. Although, it reminds me of some creatures with two heads. » Et la voilà qui glousse, à s'imaginer avec deux têtes (bonjour les dégâts et bon courage au reste du monde qui devra l'entendre parler deux fois plus). Le plan de travail organisé devant eux, elle s'empare de quelques ustensiles qu'elle regarde de plus près, Ju. « Yeah but... If everything goes wrong, everyone will know. » Et si Es semble confiant dans ses capacités, Juliet, elle, sait que tout peut vite partir en fumée avec elle. Sens propre, hélas. « But hey, if you wanted intimate, a simple date would have done the job. A têtàtête as french say. » Et son accent est déplorable mais who cares (pas Esras, elle l'espère, manquerait plus qu'il soit bilingue... quoique, apprendre le français et la cuisine en même temps lui paraît être une bonne idée). « Oh my god, do you think they're going to give us the little hat? Like the one that hides the rat in the Pixar movie, you know? » Celui qui se passe en France, justement. « Esras, Esras, Esras... What should I do with you? Even I knew her. By name mostly and only because I've read an article a few month back but I still knew she was like a celebrity in this industry. Do you know if she's the yelling kind? » Sa plus grosse angoisse, sans doute et elle est vite prompte à écouter tout ce qui est dit, en bonne élève. « Alright, she's smiling, I guess that's a good start, right? » Toujours mieux que l'inverse, de son opinion. Et puis, pas sûr qu'elle garde le sourire bien longtemps, la cheffe, tandis qu'elle commence l'historique du plat qu'ils vont devoir préparer. « I'm hungry already, please tell me you are too. » C'est qu'à parler de nourriture, son ventre réclame quelque chose à se mettre sous la dent. Elle fouille dans son sac et en tire un paquet de confiseries aux fruits secs. « Want some? » Qu'ils aient des forces pour tenir quand les effluves de leur plat viendront titiller leurs narines.